83Automne/Autunno 2022
Francophonies hongroises au féminin : traversées littéraires et sociales (XIXe-XXIe siècles)
sous la direction de Guillaume Métayer
Sommaire / Indice
Guillaume Métayer, Francophonies hongroises au féminin : traversées littéraires et sociales (XIXe-XXIe siècles)
Franciska Dede, « Âmes jumelles ». L’amitié magyare francophone de Jean de Néthy (Emmy de Némethy) et de Sigismond de Justh
Guillaume Métayer, Une Hongroise francophone dans l’ombre des grands hommes : Itóka Bölöni (1873-1951)
Sara de Balsi, La langue hongroise dans l’oeuvre d’Agota Kristof
Julia Ori, La posture littéraire de Katalin Molnár
Franciska Dede, « Âmes jumelles ». L’amitié magyare francophone de Jean de Néthy (Emmy de Némethy) et de Sigismond de Justh
Cette étude analyse la relation amicale de la femme de lettres autrichienne d’origine hongroise Emmy de Némethy, écrivant sous le nom de plume masculin de Jean de Néthy, et d’un écrivain issu de la noblesse hongroise de la fin du XIXe siècle, Sigismond de Justh. La source principale de l’article est leur correspondance francophone inédite dont la partie écrite par Némethy est conservée à la Bibliothèque nationale Széchényi de Hongrie (l’autre partie est disparue ou demeure actuellement introuvable), ainsi que leurs œuvres littéraires. Bien qu’amie de Sarah Bernhardt, première propagatrice de l’œuvre de Nietzsche en France et future traductrice des littératures nordiques, nous avons très peu de connaissances sur Emmy de Némethy. L’étude se propose de compléter ces connaissances dispersées en se focalisant sur son amitié avec Justh.
Guillaume Métayer, Une Hongroise francophone dans l’ombre des grands hommes : Itóka Bölöni (1873-1951)
Cet article vise à décrire la situation paradoxale d’Itóka Bölöni (1873-1951), autrice francophone originaire d’une région roumano-hongroise de la Double Monarchie, prise dans les rets d’affiliations croisées (genre et féminisme, langues, nations, politique), d’activités multiples complémentaires mais concurrentes (peinture, journalisme littéraire et artistique, reportage en Extrême-Orient, témoignage historique, écriture diariste, traduction) et d’émancipations inachevées, marquées par la dépendance à de nombreuses figures masculines prestigieuses utilisées comme faire-valoir (Endre Ady, Henri Barbusse, György Bölöni, Antoine Bourdelle, Anatole France…). La francophonie joue un rôle d’émancipation mais corrobore l’échec des stratégies de captation d’aura, en maintenant l’autrice dans une constante ancillarité linguistique et littéraire.
Sara De Balsi, La langue hongroise dans l’oeuvre d’Agota Kristof
Cette contribution s’intéresse à la langue maternelle hongroise dans l’œuvre de l’écrivaine francophone translingue Agota Kristof. Nous reparcourons d’abord la trajectoire biographique et linguistique de l’autrice, en nous focalisant sur l’importance et la persistance d’un noyau poétique hongrois tout au long de sa production. Nous suivons les traces du hongrois dans les textes romanesques, en relevant encore une fois le lien particulier qui persiste entre cette langue jamais nommée et la poésie. Enfin, nous abordons l’imaginaire de la langue hongroise tel qu’il s’exprime dans le discours public et dans les textes de l’autrice, de la perte de la langue maternelle à l’affirmation d’une égalité des langues.
Julia Ori, La posture littéraire de Katalin Molnár
Katalin Molnár (1951), écrivaine d’origine hongroise, publie ses livres à partir de 1995 en français. Par conséquent, elle se trouve dans une position initiale marginale non seulement pour le fait d’être une femme, mais aussi pour son origine étrangère. À travers l’analyse de sa posture (Meizoz, 2007) – et notamment de sa trajectoire éditoriale, ses prises de position publiques et textuelles, ainsi que la réception de son œuvre – nous pouvons constater qu’au lieu d’essayer d’échapper à cette identification avec ses origines, elle la met toujours en relief pour en faire un trait distinctif. En effet, elle écrit des œuvres hybrides et hétérogènes où langages, langues et discours sont mélangés, et qui témoignent de sa double appartenance et de sa situation d’entre-deux.
Franciska Dede, « “Twin souls”. Francophone-Hungarian friendship of Jean de Néthy (Emmy Némethy) and Sigismund Justh »
This study analyses the friendly relationship between the Austrian woman of letters of Hungarian origin, Emmy de Némethy, writing under the male pen name of Jean de Néthy, and a writer from the Hungarian nobility of the late 19th century, Sigismund de Justh. The main source of the paper is their inedited correspondence in French, the part of which written by Némethy is treasured in the National Széchényi Library in Hungary (the other part has disappeared or cannot be found), as well as their literary works. Apart from being one of Sarah Bernhardt’s friend, the first disseminator of Nietzsche’s oeuvre in France and a future translator of Nordic literature, we still know very little about Emmy de Némethy. This study aims to contribute to this scattered knowledge by focusing on her friendship with Justh.
Guillaume Métayer, « A French-speaking Hungarian woman in the shadow of great men: Itóka Bölöni (1873-1951) »
This article aims to describe the paradoxical situation of Itóka Bölöni (1873-1951), a French-speaking author from a Romanian-Hungarian region of The Dual Monarchy, caught in the cross-affiliations (gender and feminism, languages, nations, politics), multiple complementary but competing activities (painting, literary and artistic journalism, reportage in the Far East, historical testimony, diarist writing, translation) and partially unsuccessful emancipation efforts, marked by dependence on numerous prestigious male figures supposed to act as foil (Endre Ady, Henri Barbusse, György Bölöni, Antoine Bourdelle, Anatole France…). Francophony plays an emancipatory role but corroborates the failure of strategies to capture others’ aura, keeping the author in a linguistic and literary subaltern status.
Sara De Balsi, « Hungarian Language in the Work of Agota Kristof »
This paper investigates the role of the Hungarian mother tongue in the work of the translingual French writer Agota Kristof. First, the biographical and linguistic trajectory of the author is reviewed, focusing on the importance and persistence of her Hungarian poetic work throughout her French production. Then the presence of Hungarian in the novels is analyzed, keeping in mind the persistent link between this language – which the author never names – and poetic form. Finally, the imaginary of the Hungarian language in Kristof’s public discourse and texts is dealt with, by retracing a path from the loss of the mother tongue to the affirmation of an equality of languages.
Julia Ori, « Katalin Molnár’s Literary Posture »
Katalin Molnár, writer of Hungarian origin, published her books from 1995 in French. Therefore, she finds herself in an initial marginal position first because she’s a woman and second, because of her origin. Through the analysis of her posture (Meizoz 2007) – and in particular of her editorial trajectory, her public and textual posture, as well as the reception of her work – it is clear that instead of trying to escape this identification to her origins, she always highlights them to use them as an advantage. Indeed, she writes hybrid and heterogeneous works in which languages and speeches are mixed, and reveal her dual belonging and her in-between posture.
Franciska Dede
Chercheuse à la Bibliothèque nationale Széchényi et spécialiste de littérature, presse littéraire et civilisation du tournant du siècle (XIXe-XXe), Franciska Dede travaille surtout sur l’œuvre de l’écrivain Sigismond de Justh (elle a soutenu sa thèse à l’Université Eötvös Loránd de Budapest en 2006 au sujet des relations sociales et culturelles de l’écrivain et a publié un recueil de ses écrits en 2013) et sur l’histoire des revues littéraires : A Hét et Uj Idők. Une partie importante de ses travaux porte sur l’étude de la correspondance et du réseau de connaissances de Sigismond de Justh et sur l’étude des auteurs, des illustrations et des relations avec le public des revues littéraires de l’époque. Elle est l’autrice de deux ouvrages et de nombreux articles. <dede.franciska@gmail.com>
Guillaume Métayer
Guillaume Métayer est directeur de recherche au CNRS (CELLF-Sorbonne université), et traducteur de l’allemand et du hongrois. Il travaille sur les Lumières et leur héritage (Nietzsche et Voltaire, 2011 ; Anatole France et le nationalisme littéraire, 2011 ; Budapest 1956. La révolution vue par les écrivains hongrois, 2016) et sur les rapports entre poésie, philosophie et traduction (A comme Babel, 2020). Il a publié les Poèmes complets de Nietzsche (2019) et porté en français des poètes hongrois romantiques et modernes (Sándor Petőfi, János Garay, Gyula Krúdy, Attila József) ou contemporains (Ágnes Nemes Nagy, István Kemény, Krisztina Tóth), ainsi que la philosophe Ágnes Heller. Il a créé en 2022 une collection de poésie centre-européenne (« Centrale / Poésie », La Rumeur libre).<gme.metayer@gmail.com>
Sara De Balsi
Sara De Balsi est agrégée d’italien, docteure en littérature française et comparée et chercheuse associée à l’UMR Héritages : Cultures/s, Patrimoine/s, Création/s (CY Cergy Paris Université). Elle consacre ses recherches au plurilinguisme littéraire en français et en italien. Elle a publié Agota Kristof, écrivaine translingue (Presses Universitaires de Vincennes, 2019). <saradebalsi@hotmail.com>
Agnese Silvestri
Agnese Silvestri est professeure associée de Littérature française à l’Università di Salerno (Italie). Spécialiste des XIXe et XXe siècles, elle s’intéresse aux rapports entre créativité littéraire, mémoire historique et idéologie. Elle est l’auteure de René Kalisky, une poétique de la répétition (Peter Lang, 2007), Il caso Dreyfus e la nascita dell’intellettuale moderno (Franco Angeli, 2012). Elle a co-dirigé Il rosso e l’oro. Cinque lezioni sulla Fille aux yeux d’or (Biblink, 2017) et Séduction et vengeance : La Cousine Bette de Balzac. Cinq leçons (RomaTre Press, 2020). Elle vient de diriger « Les écrivains lecteurs de Sand – I » (Cahiers George Sand, 2020). <asilvestri@unisa.it>
Julia Ori
Julia Ori est enseignante-chercheuse à l’Université Complutense de Madrid depuis 2019. Elle a défendu sa thèse sur l’auteure bilingue franco-hongroise Katalin Molnár en 2017 dans la même université. Elle est l’auteure de plusieurs articles parus dans des revues espagnoles et internationales (Çédille, Anales de Filología Francesa, L2 Journal, International Journal of Francophone Studies) et elle a récemment co-édité le volume Naturaleza y literatura : voces ecocríticas en poesía y prosa de la collection « Nuevos horizontes de la literatura comparada » de la Société Espagnole de Littérature Générale et Comparée (2021). Elle est secrétaire de la revue Thélème. Revista Complutense de Estudios Franceses. Elle s’intéresse principalement au bilinguisme littéraire, à l’écocritique et aux études de genre. <julia.ori@ucm.es>
Interviews/Interviste
« À la pointe de la langue » : à propos d’un questionnaire à trois autrices contemporaines ayant le hongrois en partage
Interview avec Eva Almassy
Interview avec Cécile A. Holdban
Interview avec Nina Yargekov
Inédit/Inedito
Itóka Bölöni, Paysage lunaire
Comptes rendus/Recensioni
C. Khordoc, D. Raymond (dir.), Littérature et mathématiques. Dérivées variables, Études littéraires, vol. 50, n. 2 (L. Brignoli)
A. Gefen, La littérature est une affaire politique (S. Tincani)
I. Némirovsky, Tempesta in giugno, éd. T. Lussone et O. Philipponat (F. Zanelli Quarantini)
Notes de lecture/Schede
ISBN 978 88 222 68808