81Automne/Autunno 2021
L’utopie sociale dans la littérature française du XIXe siècle
sous la direction de Brigitte Diaz et Agnese Silvestri
Sommaire / Indice
Brigitte Diaz, Agnese Silvestri, L’utopie sociale dans la littérature du XIXe siècle
Vincenzo de Santis, Pensée utopique et poésie scientifique. L’Atlantiade, ou la Théogonie newtonienne de Lemercier (1812)
Damien Zanone, Roman, histoire et utopie. Sur Les Battuécas de Félicité de Genlis (1816)
Annamaria Laserra, Charles Nodier et le sort du «triste quadrupède vertical»
Agnese Silvestri, L’utopie réparatrice de la faute et les contradictions du récit romanesque: Le Curé de village de Balzac
Brigitte Diaz, Rêver la société, réinventer le couple: figures de l’utopie dans quelques romans de George Sand (Le Meunier d’Angibault, Le Péché de Monsieur Antoine, La Ville noire)
Chantal Brière, Florence Naugrette, Les jardins comme utopies sociales dans Les Misérables
Julie Anselmini, Écriture de la Révolution et utopie chez Alexandre Dumas Père: Création et Rédemption
Boris Lyon-Caen, Espèces d’utopistes. Un parcours zolien
Claire Barel-Moisan, Se marier en utopie au XIXe siècle
Catherine Mariette, Utopie et dystopie dans La Misère de Louise Michel
José-Luis Diaz, La littérature de l’avenir selon trois romans dystopiques du XIXe siècle (Émile Souvestre, Le Monde tel qu’il sera, 1847; Jules Verne, Paris au XXe siècle, 1863; Albert Robida, Le Vingtième Siècle, 1883)
Françoise Sylvos, Voyage en ballon au dessus des utopies et anticipations françaises. Poétique et idéologie du premier au second XIXe siècle
Vincenzo de Santis, Pensée utopique et poésie scientifique. L’Atlantiade ou la Théogonie newtonienne de Lemercier (1812)
L’Atlantiade, ou la Théogonie newtonienne est le résultat d’une longue gestation qui commence bien avant la date de sa parution en 1812. D’après ce qu’affirme Lemercier, l’idée lui serait venue en 1783, en assistant à l’ascension de l’aérostat de Charles que l’auteur perçut comme un véritable spectacle dramatique. Dans cette « épopée », qui mêle poésie scientifique et pensée utopique, Atlantide devient le « théâtre » d’une guerre entre les vertueux Symphytes et les Atlantes, un peuple corrompu par la religion. En dépit de son genre littéraire, qui inscrit le poème dans la tradition de la poésie vulgarisatrice, Lemercier se sert de l’utopie d’Atlantide dans une réflexion critique sur les mutations politiques de son époque.
Damien Zanone, Roman, histoire et utopie. Sur Les Battuécas de Félicité de Genlis (1816)
Le roman Les Battuécas de Félicité de Genlis (1816) s’empare d’une légende culturelle tenace depuis Lope de Vega, qui situe quelque part en Espagne l’existence d’une vallée perdue dont les habitants, sans contact avec le monde environnant, auraient gardé l’innocence des temps primitifs. Le roman accompagne la découverte du monde faite par le héros, un « Battuécas » qui découvre l’Espagne mais aussi l’histoire contemporaine dans sa grande violence (Terreur en France puis « désastres de la guerre » quand les troupes napoléoniennes entrent en Espagne). Est-il possible de lire ce roman, à l’instar de George Sand qui en fait grand éloge dans Histoire de ma vie, comme l’écriture d’une utopie ? L’article nuance sa réponse, constatant que si le roman Les Battuécas ne propose pas effectivement une utopie, il en emploie le modèle pour produire quelques leçons.
Annamaria Laserra, Charles Nodier et le sort du «triste quadrupède vertical»
Cette étude analyse l’itinéraire intellectuel de Nodier face aux thèses scientistes et utopiques de son temps. Partant de théories fixistes, Nodier s’oppose au socialisme de Saint-Simon qui envisage de remplacer la théologie par une « religion civile » fondée sur la connaissance scientifique. Néanmoins, Nodier se trouve déstabilisé par le transformisme de Lamarck et le catastrophisme de Cuvier. Ce dernier prédit la disparition possible de l’espèce humaine, ce qui, selon lui, est d’ailleurs déjà arrivé, l’actuelle n’étant qu’un perfectionnement de la précédente. Cela vient confirmer les théories de la perfectibilité et la confiance en la science des saint-simoniens. Nodier riposte en essayant d’assimiler à sa démarche la thèse de Cuvier sans renier son propre anti-progressisme. Ses idées ayant été rejetées sur le plan scientifique, Nodier les transpose dans le cycle du Dériseur sensé, où, davantage écrivain qu’homme de science, il tourne en ridicule, sur un mode farfelu, les théories de la perfectibilité
Agnese Silvestri, L’utopie réparatrice de la faute et les contradictions du récit romanesque: Le Curé du village de Balzac
Tout en considérant la Révolution comme une erreur historique aux conséquences néfastes, Balzac revisite cette expérience traumatique en imaginant des organisations sociales idéales qui s’adapteraient à ses effets et même les exploiteraient pour les opportunités de mobilité et de dynamisation sociale qu’elle a ouvertes. Dans Le Curé de village (1841), pourtant, la rencontre entre l’utopie et les exigences de représentation réaliste du devenir historique, avec ses inaboutissements et ses imperfections, perturbe les paradigmes du genre utopique et les transforme. Des inquiéudes pèsent ainsi sur la continuation du projet communautaire, tandis que le problème de l’utilisation dans la société des talents et des énergies populaires complexifie les structures récurrentes dans l’utopie narrative.
Brigitte Diaz, Rêver la société, réinventer le couple: figures de l’utopie dans quelques romans de George Sand (Le Meunier d’Angibault, Le Péché de Monsieur Antoine, La Ville noire)
L’année 1840 marque une orientation nouvelle dans l’univers romanesque de George Sand, où l’utopie – ce qu’elle appelle une « sainte folie » – tient une place de plus en plus importante. Elle expérimente alors dans ses fictions de nouveaux types de rapports sociaux que ses adversaires idéologiques taxeront d’« utopies ». Le Compagnon du tour de France (1840), Horace (1841), Le Meunier d’Angibault (1844) accordent une large place dans leur intrigue à la réflexion sur de nouveaux modes d’organisation sociale que l’on peut qualifier d’utopiques. Mais ce dispositif fictionnel se perpétue également dans des romans plus tardifs, comme La Ville noire (1860) et Nanon (1872). En quoi les fictions utopistes de la romancière se distinguent-elles de l’abondante production du temps en la matière ? Dans les romans que l’on se propose d’évoquer, l’utopie sociale s’inscrit dans une intrigue amoureuse qui n’a rien d’anecdotique puisque c’est précisément la relation sentimentale en jeu qui est le facteur opérateur d’une réorganisation sociale. Il s’agira donc d’interroger la façon dont Sand subordonne toute possibilité d’équité et d’harmonie sociales à une refonte du couple et à l’équilibre des sexes et des genres.
Chantal Brière, FLorence Naugrette, Les Jardins comme utopies sociales dans Les Misérables
ombat contre l’oppression sociale, la préface des Misérables ouvre des perspectives utopiques qui visent à substituer le bien au mal et la lumière à la nuit. Charge aux personnages de les incarner et aux lieux de les symboliser, ce que font en grande partie jardiniers et jardins. Cultivant et ordonnant l’espace naturel des seconds, les premiers œuvrent aussi pour eux-mêmes et pour l’avenir qu’ils ensemencent. Au jardin la contemplation rejoint l’action, l’exclusion n’interdit pas la générosité, ni le déclassement la dignité ; au jardin l’homme construit son éden, modèle possible mais ambigu d’une société en germe. Créé pour nourrir ou pour embellir, privé ou public, refuge ou lieu de rencontres, le jardin témoigne du lien de l’homme à la nature autant que du lien social. L’essai de Robert Harrison Jardins. Réflexions sur la condition humaine (2007) accompagne notre lecture du roman de Hugo.
Julie Anselmini, Écriture de la Révolution et utopie chez Alexandre Dumas Père: Création et Rédemption
L’article examine la représentation de l’utopie et son questionnement dans Création et Rédemption, le tout dernier grand roman de Dumas Père. L’auteure étudie d’abord la figure singulière d’utopiste qu’incarne Jacques Mérey, le héros du roman ; elle envisage ensuite la représentation et l’analyse de l’utopie révolutionnaire et de ses dérives proposées par le romancier, avant de se demander ce qu’il advient après 1793 de l’utopie aux yeux de Dumas, et de poser plus frontalement la question des fonctions de l’écriture dumasienne au regard des aspirations de ce « républicanisme de cœur, quasiment utopique » qui caractérise l’écrivain.
Boris Lyon-Caen, Espèces d’utopistes. Un parcours zolien.
Au sein des Rougon-Macquart, Zola délègue à ses créatures les plus idéalistes le soin d’incarner le socialisme quarante-huitard. Quatre romans en particulier lui en donnent l’occasion : La Fortune des Rougon (1871), Le Ventre de Paris (1873), Germinal (1885) et L’Argent (1891). Quatre postes d’observation, donnant à voir et à penser la fabrique, la facture et les usages du discours utopique. Le diagnostic paraît sans appel : prenant l’allure d’une pièce détachée, ce discours souffre d’un discrédit radical, imputable au verdict de l’Histoire aussi bien qu’au pragmatisme d’un écrivain revenu – semble-t-il – de tous les dogmatismes.
Claire Barel-Moisan, Se marier en utopie au XIXe siècle
De quelles sociétés alternatives rêve-t-on dans la seconde moitié du xixe siècle ? Autour de la question du mariage se dévoilent de multiples tensions qui sont au cœur du projet utopique, entre individu et communauté, et valorisation ou dissolution de la cellule familiale. Par le biais de la fiction, les romanciers expérimentent la réinvention des rôles sociaux, notamment dans le champ des relations entre hommes et femmes. Entre utopie et dystopie, les auteurs font la critique du mariage envisagé comme une opération financière, transposent les théories darwiniennes pour interroger les effets du mariage quant à la sélection naturelle, et imaginent de nouvelles modalités de la conjugalité, sous le signe de la liberté ou de la contrainte des corps.
Catherine Mariette, Utopie et dystopie dans La Misère de Louise Michel
Deux mois après son retour du bagne de Nouvelle-Calédonie, Louise Michel entreprend d’écrire un premier roman. Pour dire la société de son temps, tout en espérant l’abolir et la convertir en un monde régénéré, forte de son expérience du bagne et de la prison, elle choisit d’écrire un roman-fleuve où ses idées politiques s’incarnent dans des personnages de fiction. Au lieu du sentimentalisme mystique qui l’habitait jusque-là, c’est de manière réaliste qu’elle peint « la misère » des gens du peuple, et particulièrement celle des femmes. On verra donc comment, entre utopie sociale – à l’horizon des rêves de la romancière – et dystopie réaliste, s’écrit un roman foisonnant, où l’imagination fertile rivalise avec l’observation la plus précise pour dénoncer la société de la fin du XIXe siècle et en espérer une autre, plus humaine.
José-Luis Diaz, La littérature de l’avenir selon trois romans dystopiques du XIXe siècle (Émile Souvestre, Le Monde tel qu’il sera, 1846; Jules Verne, Paris au XXe siècle, 1863; Albert Robida, Le Vingtième Siècle, 1883)
Comment l’avenir de la littérature, et plus généralement de la culture et de ses institutions, est-il représenté dans ces trois romans dystopiques caractéristiques du xixe siècle, dont la ressemblance tient au fait que le premier semble avoir inspiré les deux autres ? Trait structurel commun : la découverte du monde nouveau est menée dans les trois cas par de jeunes « intellectuels », bientôt déçus par les innovations en matière culturelle. Dans les trois cas, le tableau de la littérature du futur offre un panorama en forme de diagnostic catastrophiste. Le balayage du champ culturel se fait par l’évocation des nouvelles institutions (bibliothèques, librairies, académies, lycées, théâtres, journaux) caractéristiques de la société nouvelle. L’essentiel de l’attention porte sur les deux institutions les plus médiatiques déjà au xixe siècle, le théâtre et la presse, dont l’avenir s’avère avoir aggravé encore leurs tares déjà naissantes au siècle précédent : mécanisation du travail intellectuel, développement de la presse au détriment de la littérature, montée en puissance des formes sérielles de production littéraire, omniprésence de la réclame, importance donnée au sensationnel. Mais puisque nous avons affaire à des romans, c’est aussi par les rencontres de personnages typiques du monde nouveau faites par des protagonistes eux-mêmes individualisés que le lecteur prend pied dans la décevante histoire littéraire du monde nouveau, qui s’avère une caricature poussée au noir du monde contemporain.
Françoise Sylvos, Oyage en ballon au-dessus des utopies et anticipations françaises. Poétique et idéologie du premier au second XIXe siècle
Cet article prend acte de la variété formelle des utopies et anticipations du XIXe siècle. Sont représentées de part et d’autre de la fracture 1848/1851 toutes les branches de ces deux catégories littéraires enclines à des fusions innovantes avec la poésie : les genres narratif, discursif, dramatique. à l’encontre des idées reçues, l’article souligne l’importance de la période 1800-1850 pour l’émergence de l’anticipation. Les mutations subtiles d’une période à l’autre – amplification temporelle du futur, intégration de plus en plus massive de la science – amorcent le virage des utopies vers la science-fiction.
Vincenzo de Santis, « Utopian thought and scientific poetry in Lemercier’s Atlantiade, ou la Théogonie newtonienne (1812) » – Published in 1812 after a long period of gestation and preparation, L’Atlantiade, ou la Théogonie newtonienne was conceived by Lemercier in 1783, when the author assisted to the flight of Charles’ balloon, and perceived this scientific experience as an authentic dramatic performance. In this « epic poem » – in which utopian thought mixes with scientific poetry – Atlantis becomes the « theatre » where a war between the virtuous Symphytes and the corrupted and superstitious Atlantes eventually takes place. Lemercier writes a poem using scientific vulgarization to introduce a critical enquiry on the political transformations of its time.
Damien Zanone, « Pedagogy by Utopia. About Les Battuécas by Félicité de Genlis (1816) » – The novel Les Battuécas by Félicité de Genlis (1816) is based on a cultural legend – deeply ingrained since Lope de Vega – about a lost valley in Spain where the inhabitants, having no contact with the surrounding world, preserved their primitive innocence. The plot follows the main character’s personal journey : a « Battuecas » discovers Spain and finds out about contemporary history and its great violence (Terror in France and later on the « disasters of the war » as the Napoleonic troops enter Spain). Is it possible to read this work, like George Sand who praises it in Histoire de ma vie, as an utopian novel ? The article nuances her position: if the novel Les Battuécas does not actually describe a utopia, Genlis uses the utopian model for educational purposes.
Annamaria Laserra, « Charles Nodier and the fate of the “sad vertical quatruped” » – This study follows Nodier’s intellectual itinerary through his opposition to the scientist and utopian theses of his time. Basing his view on the notion of stability (fixism), Nodier opposed Saint-Simon’s socialism which aimed at replacing theology by a « civil religion » founded on scientific knowledge. At one point, Nodier felt unsettled by Lamarck’s transformism and Cuvier’s catastrophism. The latter proved the possible disappearance of the human species, which he asserted had already happened earlier – the current species being an improved form of the previous one. Lamarck and Cuvier’s theories were confirming the notion of perfectibility and the Saint-Simonians’ faith in science. Nodier retaliated by trying to assimilate Cuvier’s ideas into his own approach, but did not renounce his own anti-progressivism. Once his ideas were rejected by science, Nodier transposed them in the Dériseur sensé in which, as a writer rather than a scientist, he ridiculed, on a farfetched mode, the notion of perfectibility.
Agnese Silvestri, « Utopia Restoring the Fault and the Contradictions of the Novelistic Narrative : Balzac’s Le Curé de Village » – While considering the Revolution as a historical fault with harmful consequences, Balzac rethinks this traumatic experience by imagining ideal social organisations adapting to its effects and even exploiting them for the opportunities of social mobility and dynamisation unleashed by the Revolution itself. In Le Curé de village (1841), however, the convergence between utopia and the demands for realistic representation of the historical future, with its failures and imperfections, troubles and transforms the paradigms of the utopian genre. Concerns about the perpetuation of the collective project are thus raised, while the problem of the use of popular endowments and energies in society complicates the recurring structures in the narrative utopia.
Brigitte Diaz, « Dreaming society, reinventing the couple. Figures of Utopia in three George Sand’s novels (Le Meunier d’Angibault, Le Péché de Monsieur Antoine, La Ville noire) » – The year 1840 marks a new orientation in George Sand’s fictional world. From that moment on, she experiences in her fictions new types of social relations that her ideological opponents denounce as utopias. Utopia – what Sand calls a « holy madness » – plays an increasingly important role in her literary production. Le Compagnon du Tour de France (1840), Horace (1841), and Le Meunier d’Angibault (1844) plots are largerly focused on the search for new modes of social organization, that may be described as utopian. But this trend goes on in later novels, such as La Ville noire (1860) and Nanon (1872). How are George Sand’s novels different from the contemporary abundant production in this genre ? In the novels that we analyze social utopia is part of a sentimental plot which proves not anecdotal since the sentimental relationship is actually the most important catalyst of the social reorganization. The question is how Sand subordinates any possibility of social equity and harmony to an overhaul of the couple and to the aim of gender balance.
Chantal Brière, Florence Naugrette, « Gardens as social Utopias in Les Misérables » – By claiming a « militant » nature for the novel, hence its usefulness in the fight against social oppression, the preface of Les Misérables opens up utopian perspectives intended to substitute good for evil and light for darkness. It is the duty of the characters to incarnate them and that of the settings to symbolize them, as gardeners and gardens do in large part. Cultivating and arranging the natural space of the latter, the former work for themselves as well, and for the future they are sowing. In the garden, contemplation meets action, exclusion is no bar to generosity, nor does loss of class status preclude dignity. In the garden, man builds his Eden, a possible but ambiguous model for a germinating society. Created to nourish or to beautify, private or public, retreat or meeting place, the garden bears witness to the bond between man and nature as well as to the social bond. Robert Harrison’s book Gardens : An Essay on the Human Condition (2007) serves as an accompaniment to our reading of Hugo’s novel.
Julie Anselmini, « Writing the Revolution and Utopia : Création et Rédemption by Alexandre Dumas Father » – This article examines the representation of utopia and its questioning in Création et Rédemption, the very last great novel by Dumas Father. The author studies first the singular figure of the utopist embodied by Jacques Mérey, the hero of the novel ; she then looks at the representation and analysis of the revolutionary utopia and of its drifts proposed by the novelist. She finally examines what happens to this utopia in the eyes of Dumas after 1793, and questions more directly the functions of Dumas’ writing in the light of the aspirations of the « almost utopian republicanism of the heart » characterizing the writer.
Boris Lyon-Caen, « Species of Utopians. A zolian itinerary » – Within the Rougon-Macquart series, Zola assigns his most idealist creations the task of embodying the Socialism of 1848. This is chiefly the case in four of his novels : La Fortune des Rougon (1871), Le Ventre de Paris (1873), Germinal (1885) and L’Argent (1891). These amount to four observation points which allow us to witness and grasp the shape, the making, and the uses of utopian discourse. Zola’s judgement seems to be final : such discourses seem detachable and almost « frozen » ; they are radically discredited, both by the judgment of History itself, and by the pragmatic vision of a writer who has experienced and overcome – so it seems – all forms of dogmatism.
Claire Barel-Moisan,
« Getting married in Utopia in the 19th century » – What alternative societies did people dream of in the second half of the 19th century ? The issue of marriage raises multiple tensions that prove crucial for the utopian project, tensions both concerning the relationship between the community and the individual, and promoting or dissolving family as a unit. Through fiction, novelists experimented with the reinvention of social roles, notably in the field of relationships between men and women. Both in utopias and in dystopias, authors criticized the concept of marriage as a financial operation, incorporated darwinian theories to question the effects of marriage on natural selection, and imagined new forms of conjugality favoring either bodily freedom or imprisonment.
Catherine Mariette,
« Utopia and dystopia in Louise Michel’s La Misère » – Two months after her return from the French penal colony of New Caledonia, Louise Michel started writing her first novel. Wishing to speak about the society of her time, while simultaneously hoping to abolish it and convert it into a renewed world, she chose to write a roman-fleuve in which her political ideals would be embodied by fictional characters using her experience left over from the penal colony and jail. Renouncing the mystical sentimentalism which inhabited her previous way of writing, she decided to realistically describe people’s and especially women’s « misère » in a realistic way. We will see how social utopia – shaped around the author’s dreams – and realistic dystopia create a teeming novel where a fertile imagination goes hand in hand with the most accurate observation, so as to condemn the late XIXth century world and to hope for a more human society.
José-Luis Diaz,
« The literature of the future according to three 19th century dystopic novels: Émile Souvestre, Le Monde tel qu’il sera, 1846. Jules Verne, Paris in the 20th century, 1863. Albert Robida, The Twentieth Century, 1883 » – How is the future of literature, and more generally of culture and its institutions, represented in these three typical 19th century dystopic novels, whose resemblance lies in the fact that the first seems to have inspired the other two? They share a common structural feature : the discovery of the new world is led in all three cases by young « intellectuals », who are soon disappointed by innovations in the cultural field. In all three cases, the picture of literature offers a scenario in the form of a catastrophist diagnosis. The scanning of the cultural field puts into perspective new institutions (libraries, bookstores, academies, high schools, theatres, newspapers) characteriszing the new society. Most of the attention is focused on theatre and press, which were already the two most largely media-centered institutions of the 19th century. Their main flaws, which were already emerging in the previous century, seem to have worsened in the future, as proven by the mechanization of intellectual work, the development of the periodical press at the expense of literature, the rise of serial forms of literary production, the omnipresence of advertising and the importance given to sensationalism. Thanks to the encounters between the self-centered protagonists and other typical characters, the reader is confronted with the new world’s deceiving literary history, which finally proves a dark caricature of contemporary society.
Françoise Sylvos,
« Balloon travel over French Utopias and anticipation novels from the 19th century » – This paper takes note of the formal variety of the utopias and the anticipation stories during the 19th century. Every type of utopias and anticipation stories exist before and after the break of 1848/1851. The utopia is characterized by the melting with poetry, theater and narrative fiction. This paper highlights the significance of the period of the first part of the 19th century, often diminished by modern criticism. The article then analyzes the differences in utopian fiction produced in the first and second part of the century. The subtle mutations in the works throughout the century – mainly consisting in temporal amplification, increasingly massive integration of science – announce the shift from utopia to science fiction.
Vincenzo De Santis
Vincenzo De Santis est professeur associé de Littérature française à l’Università di Salerno et docteur de l’Università di Milano et de Sorbonne-Université. Il a publié sa thèse sur le théâtre de Lemercier en 2015 aux Classiques Garnier. Ses domaines de recherche sont le théâtre et la littérature du XVIIIe siècle et les rapports entre théâtre, littérature et pouvoir pendant la Révolution et l’Empire. Il a publié avec Mara Fazio une édition critique de Zaïre de Voltaire chez ETS (Pise). Il est membre de l’équipe d’édition du théâtre complet de Voltaire (Classiques Garnier). <vdesantis@unisa.it>
Damien Zanone
Damien Zanone est professeur de Littérature française à l’Université Paris Est Créteil. Il travaille principalement sur l’écriture autobiographique et sur le roman au XIXe siècle. Sur la question des Mémoires et des liens entre littérature et histoire, il a publié une monographie, Écrire son temps. Les Mémoires en France de 1815 à 1848 (2006) et trois ouvrages issus de travaux collectifs : Le Moi, l’Histoire. 1789-1848 (2005), Le Sens du passé (2013) et « La Chose de Waterloo ». Une bataille en littérature (2017). Il est par ailleurs l’auteur de nombreuses études sur George Sand et d’éditions critiques d’œuvres de celle-ci (Histoire de ma vie, Consuelo, Valentine). Il s’occupe plus particulièrement, depuis le collectif qu’il a codirigé en 2012 sur La Tradition des romans de femmes. XVIIIe-XIXe siècles, des représentations qui associent les femmes et le roman au XIXe siècle. <damien.zanone@u-pec.fr>
Annamaria Laserra
Professeure de littérature française à l’Università di Salerno, et auparavant à l’Università di Roma II « Tor Vergata », Annamaria Laserra a publié de nombreux essais, volumes et éditions allant du xviie au xxe siècle, centrés sur les rapports entre la littérature et les arts, le sacré, les sciences, la mémoire historique. Spécialiste de Roger Caillois, elle a traduit en italien quelques-unes de ses œuvres et lui a consacré plusieurs volumes et essais. Concernant ses études sur le xixe siècle, elle s’est intéressée au roman et à la nouvelle (Stendhal, De Coster, Vigny, Mérimée, Maupassant, Zola, Barbey d’Aurevilly, Mirbeau), à la poésie (Vigny, Maeterlinck), au fantastique (Mérimée). Elle est également l’auteure de plusieurs traductions littéraires du français à l’italien, dont, toujours pour le xixe, La Chartreuse de Parme. Par ailleurs, elle dirige actuellement la collection « Anamorfosi » pour les Éditions Euno, Leonforte (Enna, Italie). <anlaserra@gmail.com>
Agnese Silvestri
Agnese Silvestri est professeure associée de Littérature française à l’Università di Salerno (Italie). Spécialiste des XIXe et XXe siècles, elle s’intéresse aux rapports entre créativité littéraire, mémoire historique et idéologie. Elle est l’auteure de René Kalisky, une poétique de la répétition (Peter Lang, 2007), Il caso Dreyfus e la nascita dell’intellettuale moderno (Franco Angeli, 2012). Elle a co-dirigé Il rosso e l’oro. Cinque lezioni sulla Fille aux yeux d’or (Biblink, 2017) et Séduction et vengeance : La Cousine Bette de Balzac. Cinq leçons (RomaTre Press, 2020). Elle vient de diriger « Les écrivains lecteurs de Sand – I » (Cahiers George Sand, 2020). <asilvestri@unisa.it>
Brigitte Diaz
rigitte Diaz est professeure de Littérature française du XIXe siècle à l’Université de Caen-Normandie. Une partie importante de ses travaux porte sur l’étude des correspondances et des journaux personnels d’écrivains au XIXe siècle (Stendhal, George Sand, Balzac, Flaubert). Elle a fourni une synthèse de ses recherches dans son livre, L’Épistolaire ou la pensée nomade (PUF, 2002). Elle travaille d’autre part sur les rapports au XIXe siècle entre l’écrivain et l’espace médiatique de son temps. Elle a publié de nombreux articles et ouvrages sur la critique des écrivains à l’heure de la littérature industrielle, dont L’Anti-critique des écrivains au XIXe siècle (PUC, 2013) et L’Auteur et ses stratégies publicitaires au XIXe siècle (PUC, 2019). Spécialiste de George Sand elle a fourni plusieurs éditions critiques de ses œuvres (Indiana, Champion, 2008 ; Histoire de ma vie, Livre de Poche, 2004) et écrit de nombreux articles sur les rapports de l’écrivain avec la politique, l’histoire, la morale. Elle a collaboré à la récente édition de romans de George Sand dans la « Bibliothèque de la Pléiade » (2019). Elle co-dirige la revue Cahiers George Sand. <brigitte.diaz@unicaen.fr>
Chantal Brière, Florence Naugrette
Chantal Brière est membre du Groupe Hugo-Université Paris 7 et du comité scientifique de l’édition en ligne du journal épistolaire de Juliette Drouet à Victor Hugo. Elle est l’auteur de Victor Hugo et le roman architectural (Champion, 2007), Victor Hugo à Guernesey/Asile et Exil (Belin, 2013). <ch.briere@wanadoo.fr>
Florence Naugrette, Professeur à Sorbonne-Université, y enseigne l’histoire et la théorie du théâtre. Spécialiste du romantisme et de Victor Hugo, elle est l’auteur de Le Théâtre romantique (Seuil, 2001), Le Plaisir du spectateur de théâtre (Bréal, 2002), Le Théâtre de Victor Hugo (Ides et Calendes, 2016). Elle dirige l’édition collaborative en ligne du journal épistolaire de Juliette Drouet (environ 22000 lettres), en cours de parution sur . <florence.naugrette@orange.fr>
Julie Anselmini
Professeure en Littérature à l’Université de Caen-Normandie et spécialiste de littérature française du XIXe siècle, Julie Anselmini travaille particulièrement sur l’œuvre d’Alexandre Dumas père (elle a publié Le Roman d’Alexandre Dumas père ou la réinvention du merveilleux chez Droz en 2010, dirigé un volume collectif sur Dumas critique paru aux PULIM en 2013, édité Gaule et France de Dumas chez Garnier en 2013…) ; elle s’intéresse plus généralement à l’émerveillement en littérature (elle a co-dirigé sur cette question un ouvrage avec Marie-Hélène Boblet paru aux ELLUG en 2017) et elle a également travaillé sur des auteurs tels que Sand, Gautier ou Barbey d’Aurevilly, particulièrement sous l’angle des relations entre littérature et critique. <julie.anselmini@unicaen.fr>
Boris Lyon-Caen
Maître de conférences à Sorbonne Université, Boris Lyon-Caen est spécialiste du roman français du XIXe siècle. Il est l’auteur de Balzac et la comédie des signes. Essai sur une expérience de pensée (PUV, 2006). Entre autres travaux collectifs, il a co-dirigé Balzac et la crise des identités (Pirot, 2005), Le Roman du signe. Fiction et herméneutique au XIXe siècle (PUV, 2007), Balzac et le politique (Pirot, 2007) et Essai et essayisme au XIXe siècle (Classiques Garnier, 2014). <boris.lyoncaen@gmail.com>
Claire Barel-Moisan
Claire Barel-Moisan est chargée de recherches au CNRS (UMR IHRIM, ENS-Lyon). Elle enseigne à Hamilton College (Paris) et à l’École normale supérieure de Lyon. Spécialiste de la poétique romanesque balzacienne, elle a publié des travaux sur la littérature romanesque du xixe siècle (en particulier sur Balzac, Sand et Flaubert). Ses recherches portent actuellement sur la science et les savoirs dans le roman français et dans la presse (xixe siècle et début du xxe siècle). Elle a dirigé l’ANR Anticipation, sur le roman d’anticipation scientifique (1860-1940). <claire.barel-moisan@ens-lyon.fr>
Catherine Mariette
Catherine Mariette est professeure de littérature française à l’Université Grenoble-Alpes, UMR « Litt&Arts ». Spécialiste du xixe siècle, elle travaille essentiellement sur Stendhal, George Sand et la littérature féminine. Elle a fait paraître une édition critique, Napoléon de Stendhal (Stock, 1998) et publié de nombreux articles sur cet auteur. Elle a édité Simon pour les Œuvres complètes de George Sand (Champion, 2010) et a dirigé des ouvrages collectifs parmi lesquels La Tradition des romans de femmes XVIIIe-XIXe siècles (en co-direction avec D. Zanone, Champion, 2012), L’Expérience romanesque au XIXe siècle (Romanesques, n. 5, Classiques Garnier, 2013), George Sand face aux violences de l’Histoire (Les Cahiers George Sand, octobre 2015), Stendhal historien (Recherches & Travaux, 2017), Stendhal et Winckelmann (UGA, 2017). <catherine.mariette@univ-grenoble-alpes.fr>
José-Luis Diaz
José-Luis Diaz est professeur émérite de littérature française du xixe siècle à l’Université Paris-Diderot. Président de la Société des études romantiques et dix-neuviémistes (SERD), il dirige le Magasin du XIXe siècle. Ses travaux ont porté sur les représentations de l’écrivain au xixe siècle (L’Écrivain imaginaire. Scénographies auctoriales à l’époque romantique, Champion, 2007) ; sur l’histoire du biographique (L’Homme et l’œuvre : contribution à une histoire de la critique, PUF, « Les Littéraires », 2011) ; sur Balzac (Devenir Balzac. L’Invention de l’écrivain par lui-même, Pirot, 2007 ; un « Foliothèque » sur Illusions perdues) ; coordination d’un numéro de la RSH sur Balzac et l’« homme social » (2016-3) ; sur Sand (direction de l’édition des Œuvres romanesques de Sand dans la Pléiade) ; sur les correspondances du XIXe siècle (direction du n. de Romantisme : J’ai toujours aimé les correspondances, 1995-4) ; sur la critique et l’histoire littéraire du xixe siècle (Sainte-Beuve, Pour la critique, Gallimard, « Folio » ; coordination d’un numéro de la RSH sur les Préfaces et manifestes du xixe siècle (n. 295, 2009/3) ; d’un numéro de la RHLF intitulé Multiple histoire littéraire (2003-3) ; d’un numéro de Romantisme co-dirigé avec Alain Vaillant : Histoire littéraire/histoire culturelle (2009-1) ; d’un numéro de la RHLF sur Les sociabilités littéraires au xixe siècle (2010-1) ; d’un autre numéro de la même revue sur Les canons littéraires au xixe (2014-2).<joseluisdiaz64@gmail.com>
Françoise Sylvos
Françoise Sylvos est professeure des universités en Lettres modernes à Saint-Denis de La Réunion. Ses recherches portent sur la littérature française du XIXe siècle et sur les cultures et littératures de l’Océan Indien. Elle est responsable de l’axe « Imaginaire, voyage et utopies » de D.I.R.E. Elle a publié Nerval ou l’antimonde, L’Harmattan, 1997 ; L’épopée du possible ou l’arc-en-ciel des utopies (1800-1850), Champion, 2008, Gérard de Nerval et l’esprit critique, satire révolte et utopie, ANRT, 2015 et une édition critique des Maîtres mosaïstes de George Sand (Champion, 2016). Elle a publié de nombreux articles et, en collaboration, des volumes collectifs et numéros de revues ayant trait à la littérature française du XIXe siècle, au comique (Humour et esthétique, 1997, n. 8) ; La Comédie sociale, PUV, 1997) ; aux poétiques de l’imaginaire (L’Imaginaire du volcan, Presses universitaires de Rennes, 2005 ; Poétiques du voyage aérien dans la littérature, Classiques Garnier, 2015 ; Tabou et censure, Classiques Garnier, « Littérature et censure », à paraître), et aux utopies (Lettre et utopie, Revue de l’AIRE, n. 30, 2004 ; Uglossies. Travaux et documents, n. 23, 2005 ; Théâtre et utopie, Revue Tropics, 2014 ). Elle a coordonné des travaux collaboratifs sur les littératures de La Réunion et de l’océan Indien (Magma mater. L’imaginaire du volcan dans l’océan Indien, Le Publieur/Sedes, 2005 ; Les Littératures réunionnaises, Francofonia, 2007 ; Utopies et dystopies coloniales, K’A, 2017 ; Culture, propagande et militantisme, Océan Indien, XIXe/XXe siècles, PUI, 2020 ; Gages d’affection, culture matérielle et domaine de l’intime dans les sociétés d’Europe et de l’océan Indien, PUI, 2021). <francoise.sylvos@wanadoo.fr>
Comptes rendus/Recensioni
É. Essono Tsimi, Vous autres, civilisations, savez maintenant que vous êtes mortelles. De la contre-utopie (V. Stiénon)
A. Saignes, La Pensée politique de l’anti-utopie (C. Couleau)
J.-L. Laville, M. Riot-Sarcey, Le Réveil de l’utopie (G. Tatasciore)
N. Wolf, M. Rémy (dir.), Ce que Mai 68 a fait à la littérature (F. Lorandini)
Notes de lecture/Schede
Pubblicato con contributi del Dipartimento di Lingue, Letterature e Culture Moderne dell’Università di Bologna.
ISBN 978 88 222 67979