45Automne / Autunno 2003
Memoria, storia, romanzo. Intersezioni e forme della scrittura francese medioevale
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Sommaire / Indice
Giuseppina Brunetti, Introduzione
Paolo Bagni, Tra Europa e utopia: rileggendo Mimesis
Gioia Paradisi, «Par muement de languages». Il tempo, la memoria e il volgare in Wace
Arianna Punzi, Il Roman d’Eneas o la riscrittura dell’epos
Fabrizio Cigni, Memoria e «mise en écrit» nei romanzi in prosa dei secoli XIII-XIV
Richard Trachsler, «Vaticinium ex eventu». Ou comment prédire le passé. Observations sur les Prophéties de Merlin
Giuseppina Brunetti, Le anamnesi di Tristano: nota sulla Folie Tristan di Bern
Gabriele Giannini, Prologhi e opzioni autoriali di lettura: il Florimont di Aimon de Varennes
Dorothea Kullmann, De la chanson de geste au roman historique: le prologue des Croniques et Conquestes de Charlemaine
Sarah Kay, Mémoire et imagination dans Le Joli buisson de Jonece de Jean Froissart. Fiction, philosophie et poétique
Paolo Bagni, Tra Europa e utopia: rileggendo Mimesis
Ce qui Mimésis constitue et met en place trouve sa propre expression dans le lien entre littérature – occident – réalité représentée. Et si l’acte de relecture est toujours lié au temps et à l’espace du lecteur, que signifie, aujourd’hui, relire Mimésis? Nous allons proposer de suivre quelques lignes parallèles dans des auteurs contemporains (Spitzer, Curtius, María Zambrano) et de s’interroger surtout sur des qualités de l’oeuvre: la recherche complexe du quotidien, la veine utopique, l’idée et le sentiment de l’Europe. À ce propos nous essayons de voir cette sorte de nostalgie comme la condition permettant au lecteur de Mimésis de découvrir peut-être une Europe qui, dans l’éthique qui soutient la philologie, renaît toujours comme telos du savoir.
Gioia Paradisi, «Par muement de languages». Il tempo, la memoria e il volgare in Wace
Les remarques sur les langues et le langage exprimées par Wace dans la Geste des Bretuns et la Geste des Normanz sont nombreuses et dignes d’être évaluées dans l’ensemble pour mieux apprécier la conscience linguistique de l’auteur en rapport à son mestier d’écrivain en langue vernaculaire. En particulier, les étymologies des noms de lieu et la liste de noms anciens et modernes de villes et régions dressée dans le prologue de la Geste des Normanz révèlent la maîtrise des notions spécifiques, concernantes la tradition grammaticale et la pensée linguistique sur la latinitas. La tâche de la littérature est le remembrer, la mise en mémoire du langage, qui est muable de sa nature. Ainsi donc la conscience linguistique de la langue vulgaire est liée avec l’idée de la dimension historique du langage.
Arianna Punzi, Il Roman d’Eneas o la riscrittura dell’epos
L’auteur se propose d’étudier les rapports entre l’Eneide et l’Eneas médiéval, qui révèlent des fortes différences non seulement à cause de l’importance accordée aux épisodes amoureux, mais en raison des significations idéologiques et d’intentions politiques nouvelles qui transforment la vérité historique et spirituelle de l’oeuvre virgilienne.
Fabrizio Cigni, Memoria e «mise en écrit» nei romanzi in prosa dei secoli XIII-XIV
Le cycle en prose du Lancelot-Graal montre, avec une fréquence régulière, une scene qui a les caractères d’un vrai rituel collectif, établi pour fixer ce qu’on pourrait définir comme «mémoire de la cour». Il s’agit de la mise en écrit des aventures des chevaliers du roi Arthur, rituel confié à l’oeuvre savante des clercs qui tiennent à jour le livre des aventures, miroir idéal de celui que le lecteur est en train de lire. Cet article essaye de relever certains éléments qui sont à l’origine de ce que la Vulgata présente comme un topos chevaleresque (en particulier le rôle de Merlin dans les romans de Robert de Boron), pour en déceler l’évolution dans d’autres romans en prose, français et italien, des XIIIe et XIVe siècles, notamment le Tristan en prose, la Compilation de Rustichello da Pisa et la Tavola Ritonda.
Richard Trachsler, «Vaticinium ex eventu». Ou comment prédire le passé. Observations sur les Prophéties de Merlin
Avec son Historia regum Britaniae, Geoffroy de Monmouth a lancé la carrière littéraire de Merlin, le prophète infaillible des Bretons. Il a crée un être à part, doté d’origines troubles, mais qui lui assurent son omniscience: Merlin connaît les choses faites, dites et allées. Mais Geoffroy a également placé dans la bouche de son prophète une série de vaticinations concernant l’avenir du pays, la Prophetia Merlini, un texte chargé de métaphores et réfractaire à toute lecture univoque. Pour authentifier la parole de son devin, et du même coup celle de l’Historia, Geoffroy a eu recours, pour une bonne partie, au stratagème de la prédiction ex eventu. Il fait semblant d’annoncer des choses qui se sont déjà réalisées et qu’il a lui même décrites dans son livre ou tirées de l’histoire contemporaine. Grâce à ce mécanisme, les vaticinations annonçant réellement des événements futurs se trouvent investis d’un potentiel de crédibilité immense, comme l’atteste le gran nombre de manuscrits et de commentaires. Cette étude montre d’abord comment la littérature vernaculaire, en particulier le Merlin de Robert de Boron, s’approprie le personnage de Merlin et son hermétique stilus profeticus en multipliant les démonstrations de son omniscience et en développant le récit de ses origines. Dans la littérature romanesque, c’est Merlin lui-même qui est l’exégète de sa parole obscure. Les lecteurs de la Prophetia Merlini par contre ne disposent d’aucune information supplémentaire. Ils sont obligés d’interpréter eux-même les vaticinations pourtant sur l’avenir. D’où l’existence d’un grand nombre de commentaire médiévaux, dont quelques échantillons sont ici présentés, qui proposent tous des lectures différentes, faites en fonction d’une époque et d’un entourage spécifique.
Giuseppina Brunetti, Le anamnesi di Tristano: nota sulla Folie Tristan di Bern
Les deux Folies Tristan constituent des lieux textuels où s’accomplit, à travers la voix du protagoniste, une re-création du/des roman/s de Tristan et Yseut: la narration même dans les Folies coïncide avec le souvenir. La modalité et les moyens permettant l’acte de mémoire sont toutefois strictement liés aux états de transmission du texte et donc à des problèmes d’interprétation philologique. L’analyse que nous allons proposer se concentre sur la Folie de Berne, un texte exceptionnel qui laisse pourtant entrevoir des failles, voire des transitions narratives complexes, dont le manuscrit de l’oeuvre conserve les traces.
Gabriele Giannini, Prologhi e opzioni autoriali di lettura: il Florimont di Aimon de Varennes
L’analyse des deux prologues du Florimont d’Aimon de Varennes mène à l’identification des deux propositions proémiales qui engagent et fixent d’une façon très nette les modalités de lecture du roman: le premier prologue souligne la dimension didactique du récit et déclare la volonté explicite de fournir, avec le Florimont, un manuel, à la fois théorique et pratique, pour l’éducation et l’édification de l’aristocratie chevaleresque; le deuxième prologue, par contre, s’occupe d’insérer le roman et son héros éponyme à l’intérieur d’un système macrotextuel et généalogique très cohérent, celui du Roman d’Alexandre en ancien français. L’examen approfondi d’une partie homogène de la tradition manuscrite du Florimont, produite dans l’Italie du nord entre 1300 et 1350 environ, permet enfin de vérifier si et comment les indications données par Aimon dans les prologues sont demeurées visibles et productrices de sens un siècle après leur rédaction.
Dorothea Kullmann, De la chanson de geste au roman historique: le prologue des Croniques et Conquestes de Charlemagne
David Aubert, dans le prologue des Croniques et Conquetes de Charlemaine, fait preuve d’une conscience théorique exceptionnelle. Parmi les arguments multiples qu’il y donne pour justifier son ouvrage, deux, à y regarder de près, se présentent sous une forme assez originale. Il invoque un modèle prestigieux, d’une autorité reconnue, uniquement pour en souligner le caractère lacuneux. Il semble tenir plus au grand nombre de ses sources qu’à leur autorité; la mémoire des anciens se confond pour lui avec la totalité de la tradition écrite. En confrontant ces arguments avec les motifs authentifiants employés auparavant, et avec leurs sources directes, les Grandes chroniques de France et la Chronique du Pseudo-Turpin, on constate qu’ils constituent un pas important dans l’évolution organique qui aboutira au roman historique.
Sarah Kay, Mémoire et imagination dans Le Joli buisson de Jonece de Jean Froissart. Fiction, philosophie et poétique
L’article concerne les exemples soi-disant «ovidiens» dans les dits de Froissart et surtout ceux qui sont inventés ou déformés par Jeunesse et Désir dans le Joli buisson de Jonece. Il comporte quatre parties. La première esquisse les grandes lignes de la pensée médiévale sur la connaissance, l’imagination et la mémoire dans les décennies qui précèdent la carrière de Froissart. La seconde décèle l’empreinte de ces idées sur les passages philosophiques du Joli buisson de Jonece qui font allusion à la problématique des universaux. La troisième relève l’effet de ces considérations sur les exemples, partagés comme ils le sont entre l’imagination et la mémoire de ceux qui les racontent. La dernière partie de l’article constate que ce qui est «oublié» dans l’exemple se retrouve «imaginé» dans le lyrisme. Dans la poétique des formes fixes, Froissart trouve une sorte de mémoire lyrique où malgré l’emprise sur la pensée des universaux le souvenir du particulier semble être conservé.
Comptes rendus/Recensioni
D. Boutet, Formes litteraires et conscience historique aux origines de la littérature française (1100-1250) (Paolo Rinoldi)
A. Varvaro, I romanzi della Romania medievale, in Il romanzo a cura di Franco Moretti. III. Storia e geografia, pp. 33-56 e Mythos / Fabula di Maurizio Bettini ivi pp. 93-107; Historia di Gioia Paradisi, ivi pp. 109-116; Romanzo di Piero Boitani, pp. 141-153 (Paolo Canettieri)
Pubblicato con contributi dell’Università degli Studi di Siena.